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Conférence Cook & Health : quels bénéfices des interventions culinaires ?

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Publié le 11/11/2019
Modifié le 22/09/2022
Modifié le 22/09/2022
Temps de lecture : 11 minutes
Conférence Cook & Health : quels bénéfices des interventions culinaires ?
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La 3e conférence Cook & Health a eu lieu les 17 et 18 octobre derniers à Lisbonne et a réuni plus de 80 experts internationaux examinant les liens entre l’acte culinaire et la santé. Coup de projecteur sur quatre conférences mettant en évidence les bénéfices des interventions culinaires.

Améliorer l’alimentation des plus petits par l’implication des parents

Un essai contrôlé randomisé a été mené par l’équipe du Dr Senbagam Virudachalam (Université de Pennsylvanie, USA) auprès de parents d’enfants âgés de 1 à 3 ans, issus de milieux défavorisés et disposant d’un niveau d’éducation parmi les plus bas. L’objectif était d’améliorer l’alimentation de ces jeunes enfants, grâce à une intervention culinaire de 6 semaines (6 ateliers de 2h30 comprenant chacun la préparation de 2 entrées, 2 plats et 2 desserts). Quarante-cinq (45) adultes ont participé à l’intervention et 44 autres faisaient partie d’un groupe contrôle ; 76 % des adultes et 40 % des enfants étaient en situation de surpoids ou d’obésité.

Au sein du groupe ayant reçu l’intervention, une analyse de l’effet de dose a mis en évidence, pour chaque atelier supplémentaire suivi par les parents, des diminutions de :

  • l’apport calorique quotidien de l’enfant (-73 kcal/j, IC95% = [-145 ; -1]) ;
  • la consommation de graisses totales (-4,7 g/j, IC95% = [-9 ; -0,3]) et de graisses saturées (- 1,6 g/j, IC95% = [-3,2 ; -0,1]) ;
  • l’ingestion quotidienne de sucres ajoutés (- 4,9 g/j, IC95% = [-9,2 ; -0,5]).

Les résultats de cette étude mettent en avant les potentiels bénéfices, pour les jeunes enfants, d’une intervention culinaire à destination des parents issus de milieux défavorisés. Les auteurs insistent sur l’importance de promouvoir une bonne participation à l’ensemble de l’intervention afin que les bénéfices soient plus importants.

 

Favoriser l’acceptation de nouvelles recettes par les enfants

Le Dr Elena Urdaneta (Centre Culinaire Basque, Espagne) a examiné, en milieu scolaire, les effets d’impliquer les enfants dans les différentes étapes de la préparation d’un nouveau plat à base de légumes sur sa consommation au restaurant scolaire. Cent-un (101) enfants âgés de 8 à 10 ans ont participé à cette étude de 3 semaines. Cinquante-deux (52) (groupe intervention) ont participé à trois ateliers concernant le choix d’une recette contenant des épinards, l’achat des ingrédients nécessaires à sa réalisation et la réalisation en cuisine de cette même recette. Les 48 autres enfants (groupe contrôle) ont participé, à la place, à trois ateliers d’éducation nutritionnelle.

Au cours d’un repas au restaurant scolaire ayant lieu une semaine après le dernier atelier, les résultats mettent en évidence que seulement 11 % des enfants du groupe contrôle ont choisi, comme accompagnement, le nouveau plat aux épinards (l’autre alternative étant du riz aux légumes, recette déjà connue des enfants). Ce pourcentage s’élève à 66 % (P < 0,001) dans le groupe intervention, au sein duquel les enfants ont participé, au préalable, à toutes les étapes de la préparation de la recette (choix, achat, préparation en cuisine). Ces choix différents entre les deux groupes ont entraîné une augmentation de la consommation moyenne de la recette aux épinards dans le groupe intervention comparativement au groupe contrôle (17,6 ± 3,6 g vs. 1,9 ± 1,1 g ; P < 0.001).

Afin d’évaluer le maintien des effets observés, le même repas a été proposé aux enfants, quatre semaines après le 1er. Au cours de ce second repas, même si les choix à destination de la recette aux épinards ont diminué dans le groupe intervention (23 %), ils restent significativement supérieurs (P = 0,04) à ceux du groupe contrôle (6 %), tout comme les quantités moyennes consommées (9,3 ± 3,8 g vs. 1,3  ± 1,0 g ; P = 0,04).

Les auteurs concluent qu’impliquer les enfants dans les différentes étapes de la préparation d’une recette contenant des légumes peut augmenter son acceptation et sa consommation au restaurant scolaire.

 

Améliorer les compétences culinaires des étudiants

Le Pr Greyce Bernardo (Université fédérale de Santa Catarina, Brésil) a réalisé un essai contrôlé randomisé auprès de 76 étudiants d’université consistant en une intervention culinaire de 6 semaines et en une période de suivi d’une durée de 6 mois. Les trente-huit étudiants du groupe intervention ont reçu des cours de cuisine et ont effectué une séance d’achats alimentaires au marché local. L’évolution de leurs compétences culinaires a été comparée aux 38 autres étudiants du groupe contrôle.

Les résultats montrent, entre le début et la fin de l’intervention, une augmentation des paramètres suivants, au sein du groupe intervention :

  • Accessibilité aux fruits et légumes ;
  • Attitude globale vis-à-vis de la cuisine;
  • Sentiments d’auto-efficacité (correspond à la croyance qu’a un individu en sa capacité de réaliser une tâche) :
    • pour utiliser des techniques basiques de cuisine,
    • pour utiliser des fruits et des légumes, ainsi que pour cuisiner en fonction des saisons,
    • vis-à-vis de la connaissance de termes et de techniques relatifs à la cuisine.

Les auteurs montrent également que ces bénéfices se sont maintenus jusqu’à la fin de la période de suivi de 6 mois.

La comparaison avec le groupe contrôle met en évidence que cette augmentation des compétences culinaires au sein du groupe intervention est bien liée à l’effet de l’intervention.

En conclusion, cette étude montre l’intérêt des interventions culinaires auprès de publics étudiants pour augmenter leurs compétences culinaires et améliorer leur attitude vis-à-vis de la cuisine et en particulier des fruits et légumes.

 

Former les professionnels de santé pour diffuser les bonnes pratiques aux patients

L’équipe de Jenny Breen (Université du Minnesota, USA) a mis en place une intervention culinaire à destination des professionnels de santé et évalué les effets sur leurs capacités à communiquer auprès des patients sur la thématique de l’alimentation. Dix-huit professionnels de santé ont participé à cette intervention d’une durée de 18 heures réparties sur 6 semaines. L’intervention, menée par des chefs et des scientifiques, était basée sur des aspects pratiques (incluant la préparation de repas avec des légumes de saison, l’apprentissage de techniques culinaires spécifiques, ainsi qu’un focus sur la combinaison des saveurs et l’alimentation en pleine conscience) et des aspects théoriques sur les différents modes alimentaires et leurs liens avec les pathologies, les compétences liées à la préparation des repas et les changements comportementaux.

Une enquête réalisée avant et après l’intervention a permis de mettre en évidence des changements bénéfiques chez les participants, en particulier :

  • Une prise de conscience concernant l’importance de considérer l’alimentation dans la pratique professionnelle quotidienne ;
  • Une meilleure capacité à recommander des modifications alimentaires aux patients et à les guider dans l’organisation, la préparation des repas et l’adoption de nouvelles techniques culinaires ;
  • Une compréhension augmentée de l’impact nutritionnel du choix des ingrédients ;
  • Une confiance accrue pour discuter avec les patients des régimes alimentaires spécifiques (végétarien, végétalien, sans gluten, etc.) ;
  • Une meilleure connaissance des réseaux pouvant apporter du soutien aux patients en lien avec l’alimentation.

En conclusion, cette étude met en évidence les bénéfices à former les professionnels de santé aux aspects pratiques et théoriques liés à l’alimentation pour améliorer la prise en charge des patients au quotidien.