AccueilBrèves scientifiquesPopulationsAlimentation durableICN 2025 – Comment concilier les différentes dimensions de la durabilité alimentaire ?

ICN 2025 – Comment concilier les différentes dimensions de la durabilité alimentaire ?

Brèves scientifiques
Publié le 03/11/2025
Publié le 03/11/2025
Temps de lecture : 4 minutes
CreditPhoto : Atlas

La durabilité alimentaire a été au cœur des discussions lors de l’International Congress of Nutrition (ICN 2025 – Paris). Adam Drewnowski (Seattle, USA) et Nicole Darmon (Marseille, France) ont en particulier souligné le défi que représente la nécessité de concilier des impératifs de santé, environnementaux, économiques et socioculturels.

Adam Drewnowski et Nicole Darmon exposent les différents piliers d’une alimentation durable et mettent en avant la complexité de les faire coexister. Adam Drewnowskirappelle tout d’abord que, lorsque l’on parle d’alimentation durable, il est primordial de bien considérer l’ensemble des quatre dimensions de ce concept. En effet, une alimentation durable :

  1. se doit d’assurer la santé et la sécurité nutritionnelle d’une population,
  2. en étant économiquement accessible et viable pour l’ensemble des acteurs de la chaîne alimentaire,
  3. en réduisant l’impact environnemental,
  4. tout en respectant les dimensions sociale et culturelle.

Chacune de ces dimensions dispose d’indicateurs de mesure et de méthodologies spécifiques pour les évaluer :

  1. profilage nutritionnel des aliments ou évaluation des scores de qualité nutritionnelle (comme le HEI : Healthy Eating Index)  pour le volet « santé » ;
  2. coûts des aliments et des différentes diètes pour la dimension économique ;
  3. pour mesurer l’impact environnemental, il existe de nombreux indicateurs complémentaires, tels que les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d’eau ou encore l’utilisation des terres ;
  4. enfin, pour les aspects sociaux et culturels, des méthodes qualitatives examinant les préférences et choix alimentaires des populations ou encore les différentes valeurs associées à l’alimentation sont utilisées.

Les deux chercheurs mettent en avant l’importance du choix de l’unité de référence lorsque l’on compare les caractéristiques des aliments. Par exemple, on compare le plus souvent le coût des aliments par kilo de produit. Avec le kilo comme unité de référence, on pourrait avoir l’impression que les tomates (3,0 €/kg) sont largement moins chères que les chips (8,4 €/kg). Cependant, si on prend comme unité de référence, les calories apportées par l’aliment, on se rend compte qu’avec 1 euro on peut obtenir en moyenne 800 kcal avec des chips vs seulement 70 kcal avec des tomates. La calorie issue de la tomate est donc beaucoup plus onéreuse que celle provenant des chips. Cet exemple illustre à quel point il est primordial d’utiliser l’unité la plus adaptée à ce que l’on souhaite réellement comparer.

Adam Drewnowski insiste aussi sur le fait que ces 4 dimensions ne peuvent pas être considérées indépendamment les unes des autres, car elles rentrent souvent « en conflit ». En d’autres termes, en cherchant à améliorer une seule des dimensions, isolément, le risque est d’avoir un impact négatif sur les autres. Le chercheur cite quelques exemples de ces potentiels « conflits » :

  • les aliments avec une densité nutritionnelle élevée (protéines animales de bonne qualité par exemple) sont généralement plus onéreux et plus impactants d’un point de vue environnemental que ceux avec une densité nutritionnelle faible ;
  • les aliments les moins coûteux ont tendance à être pauvres en nutriments (aliments gras et sucrés) ;
  • les préférences alimentaires sont souvent en direction des aliments gras et sucrés, qui sont bon marché, mais pauvres en nutriments.

Nicole Darmon poursuit dans la mise en avant de la difficulté à concilier les 4 dimensions de la durabilité alimentaire en soulignant que, dans les populations peu aisées, il est fréquemment difficile de concilier budget et santé.

Il apparaît donc indispensable de faire des compromis et des optimisations pour tendre vers une alimentation plus durable.

Les résultats des différentes études présentées par la chercheuse permettent de formuler quelques pistes, à l’échelle individuelle, pour tendre vers une alimentation plus durable :

  • le premier levier à activer pour une alimentation plus durable est la réduction du gaspillage : acheter moins, jeter moins et ne consommer que ce dont on a besoin permet en effet de réduire l’impact environnemental, tout en ayant un effet favorable tant sur la santé que sur le budget alimentaire ;
  • par ailleurs, Nicole Darmon souligne l’importance, pour des bénéfices nutritionnels et environnementaux, en respectant son budget et sa culture alimentaire, d’avoir une alimentation :
    • plutôt frugale (pas d’excès de calories) ;
    • diversifiée et à tendance « flexitarienne », c’est-à-dire sans exclusion de groupes d’aliments, mais en réduisant la consommation de viandes au profit des produits laitiers, des œufs et des aliments végétaux de bonne qualité, tels que les céréales complètes, les fruits à coque et les légumineuses.