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Le petit déjeuner est-il vraiment le repas le plus important de la journée ?

Brèves scientifiques
Publié le 06/03/2017
Modifié le 12/05/2021
Modifié le 12/05/2021
Temps de lecture : 8 minutes

Etymologiquement, le « break-fast » est le repas qui rompt le jeûne nocturne. Pour ceux qui se réveillent avec la faim, c’est sans aucun doute le repas le plus important. Pour les autres, cette étude révèle que ce petit repas a peu d’influence sur le poids des sujets minces, en revanche, son omission est une hérésie chez les obèses.

La croyance « le petit déjeuner est le repas le plus important de la journée » est très répandue mais les preuves scientifiques venant l’étayer sont beaucoup moins nombreuses. S’il est vrai que les personnes consommant régulièrement un petit déjeuner auraient tendance à être plus minces et en meilleure santé, il s’agit souvent de sujets qui ont par ailleurs une alimentation équilibrée et qui font davantage d’exercice physique. Le petit déjeuner est-il donc responsable ou simplement un marqueur de cet état de « bonne » santé ?

Pour le savoir, des chercheurs britanniques ont mené un essai contrôlé randomisé, le Bath Breakfast Project (BBP), afin d’examiner l’effet sur les différentes composantes du besoin énergétique d’un petit déjeuner quotidien et régulier par rapport à un jeûne matinal prolongé.

Ainsi, pendant 6 semaines, 70 adultes, de poids normal ou obèses, ont été répartis entre différents groupes : contrôle, jeûne nocturne prolongé (pas de prise alimentaire avant midi) et petit déjeuner (consommation d’un minimum de 350 kcal dans les 2h suivant le réveil et d’au moins 700 kcal avant 11H). Les modifications corporelles, ainsi que les différentes composantes du besoin énergétique ont été mesurées.

Concernant les liens entre petit déjeuner et prise de poids, le BBP ne permet pas de mettre en évidence de différence significative, à court terme, sur l’évolution du poids que le petit déjeuner soit consommé ou non et que le sujet soit initialement de poids normal ou obèse.

Afin de comprendre le phénomène, les différentes composantes de la balance énergétique ont été étudiées :

  • les apports énergétiques
    • Les études transversales montrent généralement un apport énergétique journalier moindre chez les sujets qui ne prennent pas de petit déjeuner. Ainsi, l’étude NHANES a mis en évidence un apport énergétique inférieur d’environ 250 kcal chez les hommes et de 190 kcal chez les femmes les jours sans petit déjeuner. Dans le BBP, les sujets de poids normal qui ne prennent pas de petit déjeuner consomment 540 kcal/jour en moins. Chez les sujets obèses, les apports énergétiques journaliers ne sont pas significativement différents, qu’il y ait ou non un petit déjeuner. Il existerait un mécanisme de compensation chez les obèses non retrouvé chez les sujets de poids normal.
  • le métabolisme de base
    • C’est la principale composante de la dépense énergétique. Dans le BBP, le métabolisme de base n’est pas affecté par la prise ou l’absence d’un petit déjeuner : une différence non significative (15 kcal) est observée entre les différents groupes que les sujets soient obèses ou de poids normal.
  • la thermogénèse alimentaire
    • Elle représente seulement 10% de la dépense énergétique journalière. Différentes études suggèrent que la prise ou l’absence d’un petit déjeuner a peu d’influence sur la thermogénèse alimentaire journalière.
  • l’activité physique (AP)
    • C’est le principal facteur de variation de la dépense énergétique journalière. A l’aide d’un cardio-fréquencemètre portatif, le BBP a évalué le niveau d’AP des différents groupes de sujets. Chez les sujets minces, une augmentation de l’AP est enregistrée chez les consommateurs de petit déjeuner : + 440 kcal/jour par rapport aux sujets qui jeûnent. La population obèse est moins active dans l’ensemble (-270 kcal/jour), même si, comme chez les sujets de poids normal, une légère augmentation de l’AP est observée chez les sujets avec un petit déjeuner (+ 190 kcal/jour). Le jeûne est donc suivi d’une réduction des dépenses liées à l’AP. Le fait de « sauter » le petit déjeuner ne peut en aucun cas garantir une perte de poids.
       

Cet essai d’intervention ne permet pas de répondre catégoriquement à la question de savoir si le petit déjeuner est le repas le plus important de la journée. Par contre il montre que ce petit repas n’a pas d’influence sur le MB et la thermogénèse alimentaire.

En outre, chez les obèses, omettre le petit déjeuner n’apporte aucun bénéfice bien au contraire, puisqu’on observe une réponse métabolique visant à compenser sur la journée les calories non consommées au cours du repas et à diminuer l’AP afin de maintenir une balance énergétique positive.

En pratique, cette étude doit inciter à mettre en garde les patients en surpoids qui pensent que l’omission du petit déjeuner pourrait favoriser la perte de poids. Chez tous les autres, la pratique d’un petit déjeuner équilibré est conseillée au sein d’une hygiène de vie plus globale.

Betts J.A. & al. Proceedings of the Nutrition Society 2016 ; 75 : 464-74. Doi : 10.1017/S0029665116000318